Cher journal,

C’est la première fois que je t’ouvre. Jusqu’ici je ne trouvais pas l’inspiration nécessaire. Tenir un journal de bord, est-ce réellement utile au vu de tout ce qui se passe ici ?
Certainement.
Peut-être que quelqu’un tombera dessus un jour. Peut-être Lui. Peut-être comprendra-t-il mieux celle que je suis. Ou alors dans 100 ans quelqu’un te retrouvera j’entrerai dans l’histoire. Bon. Je fabule.
Par quoi dois-je commencer ?

Je suis une fille unique, bien élevée. On m’a choyée et aimée, désolée il n’y a rien de bien croustillant là-dedans. J’ai appris à parler très tôt et à lire également. Dans un monde où la technologie s’impose et explose j’ai très vite touché à mon premier ordinateur je n’avais alors qu’une dizaine d’années peut-être moins. Je ne m’en souviens pas vraiment car à présent la technologie fait partie intégrante de ma vie.
Excellente élève, les mathématiques n’ont jamais eu aucun secret pour moi. Les chiffres, ces séries de nombres, l’éclate totale.
Alors comme toute bonne élève on m’a mise de côté. On vous demande d’être la meilleure et lorsque vous atteignez ce haut rang vous vous rendez vite compte que la solitude est Reine.
Pas de clubs d’échec. Les surdoués sont déjà bien assez en marge de la société.
Alors l’ordinateur est devenu mon meilleur ami.
Je fréquentais les sites de discussions m’épanouissant pleinement avec mes amis virtuels. Un monde à part, à monde rien qu’à Moi.

Tu sais, avant, l’Internet régissait le monde entier.
Je voulais entrer chez Google et devenir la meilleure employée. J’ai le génie au bout des doigts. Aucun code, aucune sécurité ne me résiste. J’ai très vite appris les rudiments du crackage, j’ai commencé avec des logiciels de bases pour m’amuser et petit à petit c’est devenu une vraie passion.
Bien sûr mes parents ne comprenaient pas, ils disaient que j’étais jolie, que je devais profiter de la vie, aller en soirée. Mais comment leur dire que je n’étais pas invitée ?
L’entrée à l’université à changer beaucoup de choses. J’y ai rencontrés des gens adorables, des gens comme moi. Pas des boutonneux moches à crever. Des garçons avec qui il était facile de converser et qui plus est, étaient charmants.
J’y ai connu mes premiers amours, j’y ai découvert le sexe et ses plaisirs. Il faut savoir que le plaisir est tout un enchainement de choses, un peu comme une suite de nombres. Une fois que l’on a compris la base, le plaisir est a porté de main. Mais ils devenaient vite ennuyeux, je préférais les liaisons avec des hommes bien plus âgés, des hommes susceptible de m’intéresser et de m’élever. Du reste je me doute que mon parcours scolaire ne t’intéresse pas vraiment. J’avoue, ça a l’air sacrément chiant et ce n’est pas la partie la plus intéressante.

Je vais te parler du jour qui a tout changé. Définitivement.
Alors que nous préparions Noël avec mes parents, des évènements tragiques ont commencé. Catastrophes naturelles, la Terre avait-elle décidé de se rebeller et de faire une sélection naturelle en tuant des milliers de gens ? Une théorie risible et saugrenue mais peut-être que je n’avais pas tout à fait tort. Tout s’est enchainé si vite. Ces gens bizarres sorties d’un film d’horreur. On parle de contamination de masse. C’est flippant.
Je crois que je me croyais à l’abri de toute cette merde. Mais là ça n’avait rien d’un jeu vidéo, d’un film d’horreur, c’était juste la réalité.
Les parents allaient chercher des provisions, barricadant notre maison. Il n’y avait plus d’électricité, un vrai Chaos. J’attendais leur retour.
Jusqu’ici préservée, j’ai décidé de prendre la voiture malgré la Mort qui pesait à chaque coin de rue.
J’ai retrouvé mes parents au supermarché, ils étaient dans un sale état. Je n’ai pas réfléchis, je leur ai dit de monter qu’on irait loin de tout ça.

Je n’avais pas pensé que mes propres parents tenteraient de me tuer. Enfin non. Ce n’était plus mes parents. C’était des Monstres. J’ai fait ce que toute fille aurait tenté. J’ai parlé, je leur ai demandé de se calmer, qu’on trouverait une solution. Je ne voulais pas les abandonner. Comment résonner des personnes qui ne semblent même pas conscientes ?
J’ai hurlé et j’ai couru. J’ai pleuré, beaucoup. Je ne savais plus où aller, ni ce que j’allais pouvoir faire. Trouver une cachette, me planquer mais pour combien de temps ? J’allais juste crever de faim ? Me faire déchiqueter ? Les larmes embuaient mes yeux, je trébuchais à plusieurs reprises. J’avais le souffle coupé, pas réellement consciente de ce que j’étais en train de vivre.
On m’a aidé, on m’a prise en charge j’ai été sauvé. J’ai vu mes parents ou plutôt les monstres qu’ils étaient devenus, tomber au sol dans une mare de sang dégoulinante. De nombreux sentiments contradictoires apparaissent. Soulagement, tristesse, joie et désespoir.

J’apprends à vivre aux côtés du Capitaine et de son équipage. Il me fascine, m’intrigue. Il me considère comme une gamine ce qui a le don de m’agacer prodigieusement. Alors je lui montre ce que je sais. Je lui montre que la gamine connaît mieux que personne les recoins de l’intranet et des systèmes d’exploitation. La sécurité est sa priorité ? Parfait, j’en ferai la mienne.
Je ne pourrais jamais assez le remercier pour ce qu’il a fait pour moi. Il représente une figure paternelle indéniable. Mais depuis quelque temps je le vois autrement. Je sais qu’il est infecté. Les signes ne trompent pas. Mais si je le perds lui, qu’est-ce qu’il me reste ?
Alors je ne dis rien, je fais mon possible pour que son secret soit bien gardé. Je n’en parle à personne, pas même à lui.

Parfois je me plais à rêver. Il s’avance vers moi, caresse ma peau trop blanche je souris et lui prouve que la Gamine connaît le corps d’un Homme. Elle sait caresser, mordiller, lécher, embrasser.

Je ne sais pas ce que l’avenir me réserve. Je ne veux pas y penser. Alors en attendant, je vais te tenir secrètement sous mon oreiller en espérant que personne de mal intentionnée ne vienne y fourrer son nez.

A très vite.

Ta Sia.